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[...] Le manuel d'histoire de fin d'école primaire, fraîchement sorti de l'imprimerie Deschamps, est édifiant. D'abord parce qu'il porte toujours l'imprimatur de Mgr Joseph (Port-au-Prince, 1942). Ensuite parce qu'il est garanti par le label "propriété des Frères de l'instruction chrétienne". L'histoire respectueuse des pires fripouilles gouvernantes, s'arrête en 1957, avec l'avènement de François Duvalier. Comme les éditions précédentes, il s'achève par la mention : "Les chapitres couvrant la période 1957 à nos jours sont en préparation".
L'histoire n'est pas ici occultée, mais manipulée, falsifiée. Officielle. C'est à dire faite d'une succession de mensonges par omission.
Les libérateurs devenus de nouveaux maîtres, esclavagistes dans l'âme ? La violence de la lutte des classes ? La militarisation et la corruption rampante ? L'émergence de deux Haïti, qui brident l'éclosion d'une nation ? Le double langage des élites ? L’instrumentalisation du catholicisme comme rempart contre la protestation ? Rien de tout cela n'est contenu dans le catéchisme au service du culte des grands ancêtres. Ne garder que l'épopée, l'enrichir de légendes, le transformer en mythe. Pour mieux tenir le mouvement social en lisière.
Extrait de [s]Haiti n'existe pas[/s]
il y a également sur l'île des écoliers privilégiés :
...] Ces quelques dizaines de milliers de Portoprinciens qui s'apparentent aux classes moyennes. Pour ceux là il y a quelques écoles. Bonnes, chères élitistes. on va naturellement au lycèe français, à Union school ou à Saint Louis de Gonzagues quand on appartient à l'oligarchie; on se saigne pour y rentrer ou trouver l'équivalent quand on sort d'une bourgeoisie moins huppée. La palme au lycée français, avec ces gamins de huit ans, conduits par un chauffeur-porteur de cartable (et le cas échéant de garde du corps), attendant sur la banquette arrière de la Land-Cruiser qu'on leur ouvre la porte. [...]
C.Wargny, Haiti n 'existe pas
photo d'une villa créole haitienne.
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Systèmes éducatifs caribéens.
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[...] Etrange alliance de chiffres que le ministère de l'Education Nationale peine à préciser : 1,4 million d'enfants dans les écoles, 60 % dans la tranche d'âge des six-douze ans. Un pourcentage en progression depuis deux décennies. Mais en même temps 60 à 75 % d'analphabètes, suivants les critères choisis ! Conclusion logique : ne pas aller à l'école, c'est rester illettré, mais la fréquenter revient au même pour une grosse moitié des élèves. L'école en effet produit plus d'analphabètes que de lecteurs. [...]
C.Wargny, Haïti n'existe pas
[...] Les enfants haïtiens, quand ils ont la chance d'aller à l'école, se rassemblent le soir et révisent sous les réverbères, si l'électricité, inconstante et capricieuse, consent à éclairer quelque part quelques heures. Ils apprennent par coeur les longs résumés de la glorieuse histoire de l'indépendance. [...]
C.Wargny
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[...] Un ouvrage -parfois plusieurs- et un tableau noir. Quelques phrases passent de l'un à l'autre. Et, inlassablement, insatiablement, chapelet psalmoldié on les répète. Le maître a peut être quitté l'école vers quatorze-quinze ans, avec son certificat. Il sait lire et recopier le français qu'il comprend mal [...]
[...] Les ONG partent d'un quadruple constat: langue maternelle créole pour 95 % des enfants; français pas ou mal parlé par les enseignants (un tiers des professeurs de français des lycées ne comprennent pas les questions simples posées en français); manuels presque tous en français, apprentissage distinct des deux langues peu pratiqué.
Conséquences: enseignement livresque en français, sabir français-créole du maître, incapacité pour les élèves de maîtriser la lecture ou l'écriture dans l'une des deux langues.[...]
Christophe Wargny, Haïti n'existe pas
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8 août 2007
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01:49
L'un des plus grands maux qui affectent Haïti ce n'est pas le pillage systématique des caisses publiques par nos dirigeants politiques successifs ni leur mépris par rapport aux besoins fondamentaux du peuple mais la déperdition de la jeunesse.
La génération qui a vu le jour aux environs des années 1980 n'est vraiment pas chanceuse. Outre le SIDA, elle est affectée par des scènes sauvages jamais vues dans les films d'horreur les plus terrifiants. Le rouleau compresseur envahissant les maisons, emportant les meubles, détruisant en un clin d'oeil des armatures en béton. Ces scènes macabres ont imprégné leurs cartes mentales et troublé leur tranquillité d'esprit. Ils ont entendu les cris étouffés de ces victimes de la barbarie. Souvent le rouleau se trompe de maison et des innocents paient de leur sang des crimes qu'ils n'ont pas commis.
Cette foule d'anonymes n'hésite pas à renverser les voitures les quatre roues en l'air, les incendier, s'emparer des bijoux et des bourses des occupants.
Une épaisse fumée dégageant l'odeur de la chair brûlée indique que certains individus dénommés macoutes ou attachés viennent d'être brûlés vifs au nom du changement social et politique. Lorsque des spectacles aussi ahurissants frappent l'attention de cette jeunesse comment voulez-vous qu'elle n'éprouve un sentiment de révolte.
De jeunes Haïtiens et de jeunes Haïtiennes deviennent subitement orphelins, orphelines par suite de la disparition de leurs parents au cours de ces événements macabres. Outre les problèmes d'affection qu'ils commencent à éprouver ils sont définitivement soumis aux aléas de l'existence. Les voilà qui traînent parmi d'anciennes connaissances de leurs parents à la recherche du pain quotidien. Ils accumulent frustrations sur frustrations pour finalement se retrouver sur le pavé.
Des événements politiques pluriels ont écourté le nombre de jours de classe en Haïti. En plus du manque d'intérêt que suscitait déjà ce système scolaire mal adapté, les programmes prévus ne sont jamais bouclés. Nos enfants passent les cours primaires et secondaires sans être bien imbus de certaines notions clés. Ils cumulent lacunes sur lacunes. Aussi il n'est pas étonnant de nos jours de rencontrer un élève de certificat qui a du mal à lire un texte en français, pire encore le comprendre. Nos bacheliers savent peu.
Quant à l'Université qui a pour mission de préparer nos cadres administratifs et professionnels pour assurer la relève elle subit également les secousses de ces vagues de manifestations qui immobilisent la vie et engoncent l'économie nationale. Leurs études sont rabâchées et la plupart de nos diplômés n'arrivent pas à avoir une formation adéquate pour exercer leurs professions convenablement.
Face à ce vide béant qui s'ouvre devant nos jeunes, la peur du lendemain s'installe. Ils sombrent dans la mélancolie et le plus souvent se sacrent dans la drogue. Qui va assurer la relève? Les anciennes générations restent les bras croisés pour assister impuissantes au dépérissement de la nation.
La voie est libre aux diplomates du béton qui arrivent aujourd'hui au niveau de la candidature à la présidence. C'est le comble! La génération présente évolue en marge des principes fondamentaux de la société haïtienne. Nos jeunes sont élevés dans un climat d'anarchie. Ils n'ont plus de modèles à suivre sinon que la barbarie, le kidnapping, le commerce illicite et le trafic de la drogue. Ils ignorent notre passé habillé de gloire et ne connaissent que notre présent trempé de honte et d'indignité sous les bottes de la Communauté Internationale. La génération présente ne porte pas les semences de l'espoir pour le futur d'Haïti. C'est une génération perdue!
Jean Erich René
juin 2005
www.potomitan.info
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Articles et chroniques